Efficacité : Je ne suis pas gros, je suis efficace !

Par Thomas Norway –Dans l’épisode précédent Efficacité, ça tourne... action, nous avons abordé les efficacités maximales et réelles et vu comment augmenter le volume (la détente) des gaz de combustion, en augmentant la hauteur du cylindre et la course du piston, permettait d’améliorer l’efficacité d’un moteur au détriment de sa puissance.

Voyons maintenant plus en détails l’efficacité maximale et pourquoi essayer de l’atteindre demande un investissement infini en regardant comment les surfaces et les volumes entrent en jeu. 

 

Remarques préalables    
    1) Je ne parle que de coûts énergétiques, l’énergie qui a été consommée pour obtenir un bien ou un service, je ne parle donc pas de coût économique ou monétaire dans cet article.
    2) Efficacité = rendement 
    3) Le turbocompresseur sera abordé dans le prochain épisode.

 

Efficacité maximale

L’efficacité maximale est une efficacité théorique qu’un moteur parfait pourrait uniquement atteindre dans des conditions théoriques, c’est une limite inatteignable car cela impliquerait un coût infini. 

Clausius-Carnot nous indiquent que selon les principes de la thermodynamique 

Dès lors, l’efficacité (réelle) ne peut être qu’inférieure à celle-ci mais plus l’efficacité maximale est élevée, plus l’efficacité réelle pourra l’être. 

 

L’efficacité est donc dépendante de :
    • La source froide : la température de l’air ambiant pour le cas qui nous occupe
    • La source chaude : la température au moment de l’explosion du mélange air-carburant.

Obtenir une efficacité de 100%, nécessiterait une source froide de 0°K (le zéro absolu) ou une source chaude de température infinie, ce qui est impossible dans les deux cas.

Etant donné qu’on ne peut pas influencer la température de l’air ambiant (source froide), améliorer l’efficacité maximale demande d’augmenter la température et donc la pression au moment de l’explosion (source chaude).

Dès lors, afin que les matériaux du moteurs résistent durablement à la chaleur et au choc de la pression sans se déformer, il y a lieu d’augmenter le refroidissement de ceux-ci afin qu’ils restent à la même température de consigne pour éviter une usure prématurée.

Améliorer l’efficacité maximale implique donc d’évacuer plus de chaleur, d’augmenter le flux.

De plus, résister à une pression supérieure implique d’augmenter l’épaisseur des parois.
Or un flux de chaleur (le refroidissement) est dépendant de l’épaisseur.

La surface (du cylindre), la conductivité (de l’acier) et la différence de température ne changent pas, pour cette dernière, on souhaite justement que la température du cylindre reste identique avec une eau refroidie par un air ambiant ne changeant pas de température.

Par conséquent, augmenter l’épaisseur du matériau ne peut que réduire le flux de chaleur et de ce fait, les deux obligations d’une augmentation de l’efficacité maximale : augmenter le refroidissement tout en augmentant l’épaisseur sont antinomiques.

Il est bien évidemment possible de remplacer l’acier par d’autres matériaux mais ceux-ci seront bien plus coûteux car l’acier a le coût de production le plus faible dans les matériaux adéquats. 

Sans oublier que les variations de températures engendrent un besoin de plus précision dans les jeux de l’assemblage mécanique (l’espace entre les pièces) afin d’éviter que les gaz à (très) haute pression s’insinuent et soient perdus dans ces interstices mais également de la fatigue thermique bien ennuyeuse pour des moteurs ou des centrales nucléaires.

Finalement, augmenter l’efficacité maximale demande un investissement croissant et tendant vers l’infini étant donné l’impossibilité d’atteindre 100%.

 

La perte du cylindre

Un moteur, c’est un volume qui contient l’énergie thermique, qui sera transformée en travail mécanique avec une efficacité déterminée par les pertes.

Nous avons déjà vu la perte de chaleur résiduelle des gaz d’échappement dans l’article précédent. Voyons maintenant les pertes liées à la surface du cylindre, que j’avais considéré constantes dans le paragraphe précédent.

Cette perte est un flux de chaleur transféré via la surface des parois du cylindre = un tube.

 

Alors que l’énergie disponible pour être convertie est un volume de chaleur = un cylindre 

Pour augmenter l’efficacité, il faut réduire la possibilité de cette perte et donc que le ratio de la perte (surface) sur l’énergie disponible (volume) soit le plus faible possible.

Le seul et unique moyen de faire tendre cette perte vers zéro est d’augmenter le rayon jusqu’à l’infini (∞) :

Donc plus cette perte tend vers zéro pour viser le rendement théorique maximal, plus le rayon du cylindre tendra vers l’infini, ainsi que la quantité de matière (le coût) nécessaire à sa fabrication.

Atteindre le rendement théorique maximal demande un investissement infini.

Rappel : le rendement théorique maximal est déterminé par la température initiale donc un moteur infini ayant un température initiale de 2000°K tendrait vers son rendement théorique maximal de 85% (cf. Clausius-Carnot) et non pas 100%.

 

Un moteur parfait de puissance nulle

 

La puissance s’exprime en watts = de l’énergie (joules) par seconde ; la puissance est une grandeur physique temporelle.

 

Comme nous venons de voir que le volume augmente plus rapidement que les surfaces, nous pouvons appliquer le même raisonnement à l’aspiration de l’air de combustion via les valves du cylindre qui sont des trous (des surfaces) à sa base.

Plus on souhaitera que le moteur soit efficace, plus son rayon (perte cylindre) et sa hauteur (voir article précédent : perte échappement) devront être grands, plus le moteur sera volumineux.

Sachant que la surface des valves sera de plus en plus petite par rapport au volume, remplir celui-ci prendra de plus en plus de temps ce qui réduira la puissance du moteur. 
Et pour un moteur de volume infini, celui-ci accumulerait une puissance infinie durant un temps infini sans produire le moindre travail, la moindre puissance (Puissance= 0). Un moteur parfait, efficace à 100%, serait donc parfaitement inutile.

 

Un investissement vers l'infini

Améliorer l’efficacité réelle ou maximale d’une puissance de transformation dans une machine demande un investissement de plus en plus grand et tendant vers l’infini que cela soit par l’augmentation de la matière la composant ou par la baisse de la puissance que cette efficacité implique.

Rubrique de Thomas Norway, spécialiste en systémique de l'énergie.  "Je ne suis pour ou contre aucune technologie, je suis pour la compréhension du problème et l’acceptation démocratique des conséquences de nos choix."

 

A méditer
"L'humanité écoutera-t-elle un programme qui implique une restriction de son addiction au confort exosomatique ?" Nicholas Georgescu-Roegen

 

Dans cette série spéciale "efficience énergétique"

7. Efficacité : vers l’infini et l’extinction : Les dinosaures enfin !

6. Efficacité : au début, c’est pas cher  

5. Efficacité : le coût de la complexité

4. Efficacité : analogies & astronomie amateure

3. Efficacité : Je ne suis pas gros, je suis efficace !

2. Efficacité : moteur, ça tourne… action !

1. Efficacité : oui, mais c'est cher !  Une perte ou un gain ?

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