Les élections occidentales : Dans le miroir la crise face aux BRICS
Les téléspectateurs américains ont dû passer la soirée à se demander comment le pays en était arrivé à devoir choisir entre un vieillard et un semi-repris de justice. Pour les alliés des Etats-Unis, leur spectacle sonne comme une alarme.
Ce spectacle hollywoodien est-il le reflet de l’état de santé actuel de la première puissance mondiale ou de l'Europe?
En panne de personnalités d'Etat
Sans rien envier aux Etats-Unis, les campagnes électorales anglaise et française flirtent aussi avec cette tendance à toucher le fond, et avec ardeur et détermination, les politiciens continuent de creuser. Même la sérieuse Allemagne n’est pas épargnée par cette tendance.
Alors que les bouleversements géopolitiques mondiaux nécessitent des stratèges, l’Occident peine à trouver et élire de solides personnalités d’Etat.
Les BRICS montent en puissance
A contrario, les leaders des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) font preuve d’une certaine maîtrise tactique. Avec précision, ils préparent leur prochaine rencontre en octobre à Kazan dans le Tatarstan.
Sous la présidence de la Russie, les nouveaux membres – dont l’Egypte, l’Arabie saoudite, l’Iran, les Emirats arabes unis et l’Ethiopie – compléteront la photo de famille.
L’agenda est minutieusement préparé afin de resserrer les liens entre les membres et de prévoir de l’espace pour ceux qui voudront rejoindre la mouvance, comme Bahrain, la Turquie ou la Serbie.
Les festivités ont débuté en avril déjà avec le Forum économique de Saint-Pétersbourg. Le rassemblement annuel de dirigeants politiques et économiques mondiaux du Sud global a accueilli plus de 25 000 participants.
La Déclaration d'Astana avec Poutine et Xi Jinping
Cette semaine, alors que les médias occidentaux tournent en boucle sur l'état de santé du président américain, les présidents russe Vladimir Poutine et chinois Xi Jinping se sont rencontrés à Astana, dans la capitale du Kazakhstan. Ils ont planté une nouvelle graine dans la rhétorique d'un ordre mondial "multipolaire", contrant l'unilatéralisme américain.
La déclaration d'Astana "souligne l'engagement de tous les participants de l'Organisation de coopération de Shanghaï (OCS) en faveur de la formation d'un ordre mondial multipolaire équitable". "Il est d'une importance vitale que l'OCS se place du bon côté de l'Histoire, du côté de l'équité et de la justice", selon Xi Jinping.
Des changements tectoniques en cours dans la politique mondiale
Si en 2023, à Johannesburg, la question de l’expansion à de nouveaux pays occupa les débats, on comprend très bien que l’édition 2024 se penchera sur le positionnement des BRICS comme entité capable de concurrencer, voire de remplacer la dominance occidentale et notamment le G7, l’ONU et l’OTAN.
Malgré la pression de Washington, les membres du BRICS ne condamnent pas la guerre en Ukraine ou les tensions à Taïwan et sont alignés sur Gaza.
Leurs liens solides comprennent les deux piliers de l’économie mondiale: l’Energie et la Finance.
Il n’aura échappé à personne que la quantité de pétrole (+50%) et de gaz méthane détenue par les membres des BRICS, pays qui n’ont pas été choisis au hasard, est une arme redoutable bien plus efficace que la puissance militaire.
Le grignotage de la citadelle a débuté avec la diminution de l’utilisation du dollar américain et son remplacement par le rouble russe ou le yuan chinois dans les transactions pétrolières et gazières.
La Maison-Blanche l’a bien compris et fait pression sur les banques chinoises et indiennes pour forcer le maintien du dollar américain, sous le couvert de sanctions contre la guerre en Ukraine.
L'énergie est le sang des grandes puissances
Comme le souligne l’Agence internationale de l’énergie, la consommation d’énergie des pays occidentaux est en constante diminution et leur PIB peine à croître de plus de 1%.
La trajectoire des pays du Sud global suit une tendance inverse.
Les énergies canalisées par les BRICS sont en train de conduire à une réorganisation majeure vers un nouvel ordre international basé sur le droit, par rapport à l’ordre fondé sur les règles américaines mises en place après la chute de l’URSS.
Alors que les rencontres des BRICS ont été largement sous-estimées, voire moquées, par les Occidentaux, la désindustrialisation qui mine l’Europe, la diminution de l’accès à l’énergie et l’absence d’un leadership éclairé modifient le rapport de force.
De négligeables, par leur potentiel de nuisance, elles commencent à inquiéter. Dans son plan directeur, la Chine prévoit de devenir la plus grande puissance mondiale d’ici à 2049. Les répercussions deviennent de plus en plus pratiques et la cacophonie des élections occidentales entre en forte dissonance avec la solidité des Xi Jinping, Modi, Poutine, Mohammed ben Salmane ou Lula.
Cet aplomb est à mettre en miroir face à l'état de santé de Biden ainsi que la qualité des débats qui émanent des élections en occident. Pendant que les médias occidentaux regardent le doigt, les Brics regardent au loin, là où pointe le doigt.
Une partie de cet article a été publié dans le journal : Le Temps.
Cette version est plus complète que la version imprimée