Germany versus France : les règles !
Par Thomas Norway – Comme Johnny, je reviens parce que je voulais vous chanter encore un truc dans ce hors-série. Il ne s’agit ici que de suppositions par rapport à deux entités d’une même équipe mais même au sein d’une même équipe, on peut avoir envie d’être devant les autres.
Ce hors-série parlera de contexte socio-économique européen et des énergies. Il sera décomposé en 5 parties :
• Les règles du jeu
• Le premier round : les énergies renouvelables
• Le second round : les énergies nucléaires
• Le résultat : double KO sans vainqueur ?
• Le prosumer : le prix technique et socio-économique
On s’accroche au pinceau et on démarre.
Rappel nécessaire :
Il ne s’agit aucunement d’une critique de l’une ou l’autre technologie car elles ont toutes des avantages et des inconvénients qu’il faudra assumer. De plus, les énergies renouvelables sont non négociables pour une éventuelle transition énergétique. Enfin, le nucléaire qui a également, comme toute médaille, des revers.
Pour plus de détails, voir la chronique à ces sujets.
Ici, il s’agit plus de mettre en exergue (on m’a offert un dico pour mon anniversaire) les stratégies conjecturales de deux Etats d’une union économique que j’échafaude à l’aulne des événements contemporains afin d’améliorer tant notre compréhension des enjeux que de notre champ lexical… non, je déconne, ça sera que les enjeux.
Le marché de l’électricité
Je conseille très vivement la série de vidéos sur le marché de l’électricité du youtubeur Heu?reka pour de plus amples informations.
Pour simplifier, deux marchés se déroulent en parallèle pour déterminer le prix et assurer que l’offre est bien égale à la demande à toute heure de chaque jour de chaque année, c’est impératif sinon le réseau électrique débloque avec des risques peu sympathiques.
La base, le marché long terme:
on y échange de l’électricité pour plusieurs jours, mois ou années à une puissance fixe.
Exemple : j’achète 1 GW de puissance pour 2024 et donc pour chaque heure de chaque jour de l’année mais aussi 0,5 GW en surplus pour chaque heure de chaque jour des 4 mois d’hiver.
Le complément, le marché spot :
on y échange le manque ou le surplus par heure pour le lendemain. Le prix y est variable et spéculatif.
Analogie : tous les mois, on vous livre un bac de bières qui est consommé avec modération, c’est votre consommation de base. En été, vous commandez un bac supplémentaire de temps en temps en plus pour les barbecues : c’est la consommation spot.
Exemple positif : il faut 5GW de puissance entre 18 et 19h et avec les productions les moins chère, il manque toujours 0,5GW et donc on doit prendre aussi une ancienne centrale gaz moins efficace à 500€/MWh pour cette enchère .
Dès lors, TOUTES les producteurs repris (éolien, nucléaire, charbon…) à gauche de la ligne rouge seront payées à 500€/MWh pour cette heure-là et ce, peu importe le coût de production réel.
Exemple négatif :
Il faut 5GW de puissance entre 12 et 13h et il y a une production de 6 GW d’électricité non pilotable (éolien, photovoltaïque, hydroélectricité de rivière). L’excédent de production par rapport à la demande donc des prix négatifs pour ces productions uniquement (les autres centrales n’étant pas utilisées) car il faudra payer quelqu’un pour consommer l’électricité produite à cause du coût marginal.
Le coût marginal du marché spot
Sinon s’eut été trop simple. Les prix proposé sur le marché spot sont logiquement des coûts marginaux.
Le coût marginal : c’est le coût de production d’une unité supplémentaire ou d’un MWh supplémentaire dans notre cas et pour simplifier, c’est le coût de ce qui est consommé en plus.
Illustration : vous faites un barbecue avec des bières et des pains saucisse pour 100 personnes. Si un consommateur s’ajoute : le coût marginal de celui-ci sera le coût de la bière et du pain saucisse car cela n’aura pas d’impact sur le reste : le temps consacré (cuisson, courses, préparation), quantité de charbon de bois, électricité du frigo, …
Cependant, c’est un marché et donc les producteurs sont libres de proposer le prix qu’ils souhaitent avec le risque qu’un prix trop élevé ne trouve pas acquéreur.
Exemples marginaux théoriques :
• Charbon, nucléaire, gaz, fioul: le coût du combustible
• Eolien, photovoltaïque et hydroélectricité : 0 € car le vent, le soleil et l’eau sont gratuits
Exemples marginaux pratiques :
• Charbon, nucléaire, gaz, fioul : jusqu’à 3.000€ le MWH (prix plafond selon la loi). Si vous êtes certains qu’on aura besoin de votre production, vous pouvez demander le prix fort.
• Eolien, photovoltaïque et hydroélectricité de rivière : toujours 0€ car cette production seule n’est pas pilotable, contrôlable. Elle sera vendue au prix spot. C’est d’ailleurs pour cette raison que les éoliennes sont parfois déconnectée du réseau (mise en drapeau) quand les prix sont négatifs, pour éviter de payer pour produire (le monde à l’envers).
• Hydroélectricité de barrage: jusqu’à 3'000€ le MWH aussi car le flux est contrôlable MAIS attention, l’eau à d’autres usages (agriculture par exemple) qui peuvent contraindre le producteur à produire pour libérer de l’eau.
Il est à noter qu’une centrale, une éolienne, un barrage peut fonctionner pour produire de l’électricité qui a déjà été vendue (marché à terme) et/ou qui cherche acquéreur (marché spot).
Le prix payé sur les marchés seront donc partiellement spéculatif car le prix global sera une combinaison d’un prix déterminé (long terme) et d’un prix indéterminé (spot) pouvant être (très) positif ou (très) négatif selon le contexte.
Le prix payé par le consommateur (ménages ou entreprises) sera une combinaison de ce prix auquel on ajoute des bénéfices, des salaires, des frais de réseaux, de la TVA et des taxes et duquel on soustrait d’éventuelles aides d’Etat et autres boucliers tarifaires.
Hors-série de Thomas Norway, spécialiste en systémique de l'énergie. "Je ne suis pour ou contre aucune technologie, je suis pour la compréhension du problème et l’acceptation démocratique des conséquences de nos choix."
Pour terminer :
"La lucidité a un coût : la perte de l’insouciance." Julien DEVAUREIX
"Un optimiste, c’est un pessimiste qui n’a pas toutes les informations" Orateur inconnu