L’Europe a-t-elle encore les moyens de bluffer?

Pour gagner au poker? De bonnes cartes et un sens tactique peuvent permettre de faire un bon bout de chemin. Dans le bras de fer énergétique avec la Russie, l’Europe manque d’atouts.

La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, ne cesse de démontrer que la finesse géopolitique n’est pas son sens le plus développé, et sur le Vieux-Continent, seuls les cardiogrammes des gisements gaziers et pétroliers de la Norvège, des Pays-Bas et de l’Angleterre donnent encore des signes de vie.

 

Pour le reste, même le charbon n’est plus de qualité. Dans les faits, l’Europe est un géant aux pieds d’argile dont la libéralisation effrénée de son marché énergétique l’a propulsée dans une crise de sa propre création.

Même si Bruxelles a touché le fond, ses dirigeants font preuve de résilience pour continuer à creuser. Un chef-d’œuvre qui trouvera certainement sa place dans les livres d’histoire.

 

Pour Poutine, le déclin est à l'Est et l'avenir à l'Ouest.

Avec Vladimir Poutine ou son successeur, la Russie est, et restera, le grenier à énergies du monde. Gaz, pétrole, charbon et terres rares se cachent dans les sols de la Sibérie et de l’Arctique. Toutes ces ressources soutiennent les quatre piliers de notre civilisation occidentale: le ciment, l’acier, le plastique et l’ammoniac, incontournable fertilisant agricole.

La perception que le gaz sert essentiellement à produire de l’électricité est un biais connu. Comme dans un réflexe pavlovien, en se référant à l’Allemagne, beaucoup rabâchent que les centrales nucléaires sont la panacée. En réalité, le manque d’hydrocarbures et leurs prix élevés font tomber l’industrie comme un jeu de cartes et impactent directement des millions d’emplois.

Le deuxième sidérurgiste mondial, ArcelorMittal, a éteint ses deux hauts fourneaux en Allemagne et en Espagne.

La production d’engrais chute et que dire de la pétrochimie gourmande des molécules de gaz?

Les Etats-Unis et la Chine sont prêts à prendre le relais. Abandonner ces secteurs industriels stratégiques se paie par un abandon de sa souveraineté, comme l’a démontré la pandémie de covid.

 

Pékin maître de l'énergie

Si la Russie est le grenier énergétique du monde, la Chine a la mainmise sur les moyens de production, du solaire à l’éolien jusqu’au nucléaire. L’Angleterre a accepté le financement chinois dans la construction de ses nouvelles centrales nucléaires afin de s’assurer l’accès à l’uranium. Il faut oser cette dépendance.

Un comble, le design des appels d’offres européens pour la réalisation de fermes d’éoliennes a ouvert une voie royale aux entreprises chinoises. Il suffit à Pékin de fausser le marché pour gagner. Logiquement, les entreprises européennes Vestas et Orsted perdent ostensiblement leur leadership mondial. Cette manière de faire n’est pas sans rappeler l’OPA chinoise sur la fabrication de panneaux solaires grâce à l’approbation dogmatique d’un libre commerce prôné par l’Europe, Suisse en tête.

Situation kafkaïenne, Bruxelles propose de remplacer le gaz russe par des panneaux solaires chinois. A relire cette phrase, on devine les cartes qui se trouvent dans la main européenne.

Ne dit-on pas que quand trois personnes jouent au poker, celle qui ne sait pas qui est le pigeon, c’est justement elle. En effet, pour gagner une partie, deux joueurs s’allient pour saigner systématiquement le troisième.

 

Passer en mode géopolitique

Pour Bruxelles, jusqu’à l’obsession, l’ennemi à abattre est Vladimir Poutine, quitte à devoir continuer à s’endetter au-delà de ses limites pour soutenir les énergéticiens too big to fail et à acheter la paix sociale.

Mais derrière cet aveuglement, brille comme un soleil la Chine. Dans l’art de la guerre, Xi Jinping sait que pour vaincre la maîtrise de l’énergie est une arme plus efficace et durable que les canons. 

Si l’Europe continue de bluffer sans prendre en compte les enjeux globaux sur le long terme, la partie pourrait continuer sans elle.

 

 

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