Menace du Peak Oil
Le baril a touché les 117,60 dollars lundi. En dépit des assurances de l'OPEP, les marchés craignent de plus en plus un déficit des approvisionnements pétroliers dans les mois à venir.
Toutes les digues à même d'enrayer l'appréciation du prix du pétrole semblent submergées. Chaque jour, le cours d'un baril de light sweet crude - le prix de référence - bat de nouveaux sommets sur le marché new-yorkais. Record de clôture de 116,69 dollars, vendredi soir. Record en cours de journée, lundi après-midi, à 117,60 dollars.
« Les 120 dollars ne sont plus qu'une étape dans cette inexorable marche en avant, et la zone des 125 dollars apparaît comme le prochain objectif», annonce déjà John Kilduff, responsable des risques énergétiques chez MAN Financial à New York.
Cette effervescence sur les marchés des hydrocarbures a noyé les appels à la raison du gotha de l'or noir, réunis hier à Rome pour le Forum international de l'énergie. Président de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole - une entente contrôlant 40% des approvisionnements mondiaux -, Chekib Khelil a répété que, même si l'OPEP produisait plus, « elle ne trouverait personne pour acheter ces barils supplémentaires».
Peu avant le sommet, le ministre du Pétrole saoudien, Ali al-Naimi, avait indiqué, de son côté, que les capacités de production du Royaume demeuraient «substantielles» et que «les dernières prévisions indiquent que le monde n'aura pas davantage besoin de pétrole saoudien jusqu'en 2020». Peu importe. Le «Peak Oil », théorie selon laquelle la production de pétrole a atteint un pic, semble s'immiscer dans tous les esprits sur les marchés décidant des prix mondiaux du brut.
L'obsession du «pic pétrolier ». La volonté des dirigeants saoudiens de ne pas envisager de nouveaux plans d'accroissement de leur production?
L'essoufflement de la production en Russie? Peak Oil!
Une conclusion en partie nourrie par les prévisions de l'Agence internationale de l'énergie, la voix des pays industrialisés en matière d'énergie. Selon l'AIE, les besoins des pays émergents dépasseront cette année pour la première fois ceux des Etats-Unis.
Le directeur général de l'Agence, Nobuo Tanaka, a en outre martelé, lui aussi à Rome, que les besoins en énergie de la planète allaient doubler d'ici à 2030. Cela alors que les capacités excédentaires de production - ce matelas à même d'absorber tout sursaut de la demande - «ont chuté sous les 3 à 4 millions de barils par jour - le niveau de la précédente décennie».
Ces capacités excédentaires «ne se sont pas améliorées en un an », soutient Harry Tchilinguirian, spécialiste de BNP Paribas (BNP) à Londres.
L'OPEP ne disposant plus guère de marge de manoeuvre - à en croire l'AIE -, la seule variable d'ajustement proviendrait des pays ne faisant pas partie du cartel. Or «l'augmentation de la production de ces derniers ne suffira pas à satisfaire les besoins supplémentaires de la planète sur le premier semestre », prévient Harry Tchilinguirian. Avec un matelas aussi fin, «le marché est sensible à la moindre déception touchant à la production».
Et les cours mondiaux de réagir de façon épidermique à une attaque contre des oléoducs au Nigeria, comme hier.