L’OPEP arrivera-t-elle à imposer sa volonté

Rarement une décision de l’OPEP+, le cartel des pays exportateurs de pétrole et la Russie, aura impacté autant de domaines à la fois. Bien que ce battement d’aile d’un papillon nommé pétrole n’a pas fait la une des médias, il a le potentiel d’ouvrir une nouvelle page géostratégique.

Alors que le secteur bancaire était secoué par les faillites de banques américaines ainsi que du Crédit Suisse, le spectre d’une crise économique a été ravivé.

 

Crise économique = baisse des prix du pétrole

En toute logique, les spéculateurs parièrent sur une baisse des prix du pétrole. C’est à ce moment précis, que l’Arabie Saoudite et les monarchies du Golfe et la Russie décidèrent de retirer du marché 1 million de barils par jour, soit le 1% des extractions mondiales. Surpris, les traders ont dû immédiatement se couvrir et acheter du pétrole pour minimiser leurs pertes.

Sur la nouvelle, le pétrole a regagné 7 dollars dans une ambiance haussière notamment durant les mois d’été très énergivores. De 79$ en quelques heures, il grimpa à 85 et une semaine après à la publication de cet article, il reste sur les 86$ à Londres.

 

OPEP: une position dominante

La dernière fois que l’OPEP prit une décision aussi tranchante remonte à 2019, quelques mois avant la pandémie de Covid.

L’Arabie Saoudite et la Russie s’allièrent pour noyer les marchés afin de faire chuter les prix et mettre en faillite les producteurs de schiste américain. Le COVID aura fourni les vis sur les cercueils texans.

Aujourd’hui, Washington confirme le prochain essoufflement du schiste, mais surtout entérine, de facto, la position monopolistique de l’OPEP+. Avec une part de marché de 30%, elle devrait grimper à 50% dans les années à venir.

Dans cette position, le cartel se doit d’imposer ses tarifs et maîtriser les variations des cours afin d’assurer des revenus stables.

Les pays extracteurs pourraient prendre le pari que l’économie mondiale est capable de supporter des prix plus élevés qui pourraient dépasser les 100 dollars le baril sur le long terme.

Ce changement de paradigme est nécessaire afin de satisfaire les ambitions de la Vision 2030 de l’Arabie Saoudite et la construction de villes futuristes comme Neom ou The Ligne, une ville de 170 km de long dans le désert ou la fabrication de la neige pour les championnats asiatiques d’hiver en 2029. Pour la Russie, inutile d’énumérer la liste des avantages.

Hasard du calendrier, cette prise de décision tombe quelques semaines après plusieurs rencontres cruciales entre la Chine, la Russie, l’Arabie Saoudite et l’Iran. Elle laisse planer l’ombre du président chinois Xi Jinping dont l’opportunité d’être immunisé grâce à des hydrocarbures bon marché est trop belle pour la dilapider.

 

The Line: explications (en anglais)

 

Les pays importateurs

Du côté des pays importateurs, si la hausse des cours du pétrole se concrétisent, elle va compliquer la lutte des banques centrales contre l’inflation. Après un début d’année placé sous de meilleur hospice grâce à la chute des prix du méthane et du pétrole, l’inflation pourrait reprendre son envol et accentuer la hausse des taux d’intérêts avec la crainte de rejouer le scénario de 2008.

Pour l’Europe et le G7, cette décision challenge le mécanisme du plafonnement des prix du pétrole russe à 60 dollars afin de priver de liquidités Moscou. La forte demande de la Chine et de l’Inde a déjà poussé le prix de l'Oural au-dessus du plafond imposé. Il faudra une certaine dose de conviction de la part de Bruxelles pour convaincre ses citoyens de passer à la caisse.

 

Trump en embuscade et un monde de dépendance

Du côté américain, l’ombre d’un Trump inculpé mais candidat, inquiète Biden.

Le président a déjà vidé une partie des réserves stratégiques pour faire baisser artificiellement, manipuler diront certains, les prix à la pompe à l’occasion des élections de mi-mandat. Il y a un mois, Joe Biden a encore déversé 26 millions de barils sur les marchés pour freiner les rentrées financières de la Russie.

La hausse de l’essence fait partie des cauchemars de la Maison Blanche car Trump saura la transformer en une arme tranchante.

Alors que le monde continue de dévorer de plus en plus de pétrole, les gouvernements préfèrent augmenter cette hyper dépendance.  C’est dans ce comportement que l’OPEP puise et trouve sa force d’imposer ses choix.

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